[RP] Consécration de la chapelle

Sujet: [RP] Consécration de la chapelle Mer 10 Nov 2010 - 17:40

De l'eau avait coulé sous les ponts depuis que le Capitaine Acis avait fait appel à lui. Peccatore eût préféré passer moins de temps dans les démarches procédurières pour accomplir un geste somme toute simple mais hautement important pour la relation de l'Armée franc-comtoise à Dieu: la consécration était cette cérémonie qui attirait la bénédiction divine sur les lieux de célébration. N'ayant jamais pratiqué une telle chose durant son sacerdoce, le jeune aumônier avait d'ailleurs dû aller réviser ses classiques et les modèles écrits à sa disposition. Heureusement qu'il avait une longue expérience de rat de bibliothèque et avait ainsi pu trouver rapidement ce dont il avait besoin ! Sans quoi il eût dû se débrouiller à peu près seul !

Peccatore avait lu l'annonce (étrangement dithyrambique à son sujet) qu'avait fait placarder Acis d'Ormerach pour faire savoir que la cérémonie aurait lieu en ce froid mercredi de novembre. Depuis longtemps, le clerc n'était plus un bleu. En revanche, il l'était, bleu, transi par le froid jurassien qui venait figer tout son corps à peine réchauffé par l'étoffe qu'il avait mise "en plus", sous sa robe de bure.

Il semblait que la consécration s'appliquait comme une recette de cuisine. Les ingrédients n'étaient autres que les quatre éléments. Le cuisinier, le prêtre. Joie.

Cerise sur le gâteau, si j'ose dire, ça se faisait en extérieur ! A-t-on jamais cuisiné en extérieur au beau milieu d'un hiver boréal (NDLA : pour l'auto-justification de la frilosité frénétique du clerc comtois, la Franche-Comté est bien entendu légitimement assimilée à une contrée nordique, où le soleil ne point - au mieux - que deux mois dans l'année) ? Idée saugrenue que celle-ci. On voit bien que les originaux qui ont imaginé cette forfanterie étaient des Romains, peu coutumiers des gelées de longue durée !

Bref, il fallait faire contre mauvaise fortune bon coeur. Et Peccatore s'activait, pour essayer d'éviter de décéder de froid avant même le début de la cérémonie (c'eût été dommage) ! Il avait amené un sac de terre, disposé quelques cierges, sorti son ~~briquet~~ ~~silex~~ attirail pour allumer le feu ! Et même il avait pris garde de ne pas être à court d'eau bénite !

Et tandis qu'il bougeait autour de sa chapelle, l'heure tournait. L'aumônier réinventait le concept de l'attente : loin d'être statique, celle-ci devenait dynamique ! Les militaires ne tarderaient pas à se demander si le vicaire diocésain n'était pas un aliéné ! Bien peu pourraient leur donner tort.

Bientôt, la cérémonie commencerait. Et Peccatore, en définitive, continuait son échauffement, comme un joueur de soule consciencieux.

Sujet: Re: [RP] Consécration de la chapelle Dim 21 Nov 2010 - 13:42

L'Aumônier de l'Armée constata avec désappointement que la consécration de la chapelle n'attirait guère de monde. Tant pis, il ne pouvait plus attendre, sans quoi sa santé risquait de pâtir du temps ambiant. Il fallait passer à l'action.

Avec des gestes exagérément vifs, pour compenser la froidure de l'air dôlois, l'adolescent se précipita sur le sac de terre et commença à marcher autour de la chapelle tout en semant la terre bénite afin d'initier le rituel.

Peccatore toussa.

Une longue quinte de toux, fort peu agréable à l'oreille. Il n'était pas d'une constitution solide, et avait la santé fort précaire. Il se souvenait avoir été souvent extrêmement éprouvé lorsqu'il allait travailler à la mine, l'année passée, à peu près à la même époque, longtemps avant de devenir clerc. Il regrettait d'ailleurs toujours de ne pouvoir gagner son pain par le sacerdoce, car il préférait mille fois accomplir des tâches intellectuelles en intérieur que des travaux manuels en extérieur, ces derniers mettant à rude épreuve sa maigre résistance.

S'il ne contractait pas une maladie avec ce temps, c'était un authentique miracle... et au moins cela ferait encore avancer sur le chemin de la sainteté...

Il finit son tour de la chapelle du Bienheureux-Pouyss.

Toujours personne en vue.

Consciencieusement, mais toujours avec beaucoup d'énergie, le jeune aumônier alluma trois cierges... Leur lumière devait symboliser le Soleil et l'appel à la Foi. Leur nombre, dans l'esprit de Peccatore, évoquait la trinité du Très-Haut, d'Aristote et de Christos.

Cela fait, il se frotta les bras comme il put pour essayer de se redonner chaleur et courage avant d'entamer le moment le plus important de la consécration.

Il toussa.

Et, le vent s'étant levé, il reçut une grande bourrasque en plein visage, qui fit pleurer ses yeux et vaciller les flammes des cierges. La bise n'était pas des plus agréables.

Sujet: Re: [RP] Consécration de la chapelle Dim 21 Nov 2010 - 21:32

Après la messe célébrée dans la Cathédrale de Besançon, Iroutche avait prévu de se rendre au moins une fois à l'édifice religieux du château. Il avait lu un avis du Capitaine prévenant de la consécration d'une nouvelle chapelle et espérait que la cérémonie n'était pas déjà terminée.

Lorsqu'il arriva, le soldat vit Frère Peccatore se réchauffer auprès de trois cierges allumés récemment, d'après leur état. Vu le vent glacial qui soufflait ce jour-là, cette attitude était compréhensible.

Le Vésulien ne voulait pas troubler le déroulement de la consécration, déjà bien avancée apparemment, et resta discrètement à l'écart pour ne pas déranger l'aumônier. Ce dernier semblait fréquemment pris par une quinte de toux inquiétante...

Sujet: Re: [RP] Consécration de la chapelle Sam 27 Nov 2010 - 15:09

Une personne parut, qu'il avait déjà aperçue lors de la messe en l'honneur de Saint-Abysmo et qu'avait boudée une grande partie des "fidèles" comtois. L'homme semblait vouloir demeurer en retrait, mais cela lui serait difficile, dans la mesure où il était le seul qui fût présent. Point positif : Peccatore tenait un témoin pour certifier que la consécration de la chapelle avait bien été effectuée.

Bonjour mon frère, ravi de vous voir ici.

Il toussa.

Esquissa un sourire pour faire mine qu'il allait bien.

Savait que ce n'était pas le cas.

Poursuivit comme si de rien n'était.

Se retourna vers l'édifice.

Déclara :

Que le Très Haut protège ce lieu des impurs et en fasse un lieu qui Lui est consacré !
Que le très saint Aristote, insuffle la Raison dans les pensées tourmentées qui visiteront ce lieu,
Que Notre Créateur bénisse ce lieu dédié à la diffusion de Sa parole !
Que le très saint Christos insuffle la paix dans le cœur de ceux qui visiteront ce lieu !
Que ce lieu devienne le nœud principal de notre voyage vers la paix, l’amour et le paradis solaire.
Par Titus qui consacra la première cathédrale, et par le pouvoir qu’il nous a transmis de perpétuer ce geste,
Moi, Frère Peccatore, vicaire diocésain de Besançon, aumônier de l'armée franc-comtoise, je consacre ce lieu pour qu’il soit un point d’entrée dans la communauté des fidèles.
Ce lieu est désormais un lieu consacré interdit à ceux qui n’ont pas la foi ou qui sont exclus de la communauté des fidèles. Tout acte de blasphème fait en ses lieux sera une injure envers le Très Haut lui-même.

Puis il un flacon d'eau bénite, et aspergea l'édifice en disant :

Cette chapelle portera dorénavant le nom de chapelle du Bienheureux-Pouyss, en l'honneur du fondateur de l'Ordre Lescurien, ancien cardinal de notre Eglise, homme de consensus, d'humilité, d'enseignement et de progrès.

Le clerc toussa de nouveau, et, se retournant vers Iroutche, lui signifia d'un geste de la main qu'il le remerciait et qu'à présent, la cérémonie était achevée.

Sujet: Re: [RP] Consécration de la chapelle Sam 27 Nov 2010 - 15:39

Acis courrait partout depuis ce matin, l'annonce de la révolte à Vesoul avait tout chamboulé ses plans pour la journée. Puis, il avait totalement oublié la consécration de la Chapelle par Peccatore, vraiment une journée horrible. Lui qui s'était tant démener pour trouver un clerc acceptant de redonner foi à l'Armée. Il était impardonnable sur ce coup. Il arriva donc en courant, puis essoufflé il vit qu'un soldat était présent près du Frère.

- Bonjour soldat Iroutche. Mon Frère, veuillez vraiment m'excuser. Je viendrais à votre première confession, cela me pèse sur le coeur. Je me suis tant donné pour vous trouver, que vous acceptiez de bénir notre Armée, et me voila absent lors de cette consécration.

Il regardait vers le sol, un Capitaine normalement ne le fait jamais devant un soldat, mais là c'était différent, un homme d'Eglise devait toujours avoir, tout le respect du monde.

- Mon Frère, j'espère que vous vous portez tout de même bien ...

Sujet: Re: [RP] Consécration de la chapelle Sam 27 Nov 2010 - 22:58

Vu le peu de personnes présentes, Iroutche fut vite repéré par l'Aumônier. Sa présence ne semblait pas déranger la cérémonie. Lorsque le Religieux lui adressa la parole, il répondit :

-Merci, Frère Peccatore. Je suis ravi d'être venu.

Encore une fois, le Clerc toussa. Il semblait vraiment malade, quoi qu'il dise. Il parvint cependant à prononcer la bénédiction d'une traite.

Lorsqu'il eut fini, le Vésulien hocha la tête et se prépara à partir pour laisser l'Aumônier se reposer s'il le souhaitait mais vit quelqu'un arriver en courant. Quand il le reconnut, le soldat se mit au garde à vous et prononça la formule :

-Mes respects, Capitaine.

L'officier, essoufflé, semblait honteux d'avoir raté la cérémonie. Iroutche n'aurait jamais imaginé le Capitaine Tyran baisser la tête de la sorte. Il garda ses réflexions pour lui et se demanda si il devait rester là. Le protocole voulait que le Vésulien attende l'autorisation de quitter la position et de disposer, mais peut-être l'officier parlerait-il plus librement sans soldat dans les pieds...

Sujet: Re: [RP] Consécration de la chapelle Lun 29 Nov 2010 - 17:38

Tandis que le jeune Peccatore commençait à s'en retourner en quête d'un lieu plus chaud, il vit arriver en courant le capitaine Acis d'Ormerach. Parmi tous les Franc-comtois que l'adolescent avait côtoyés, celui-ci comptait sans doute parmi ceux pour lesquels il avait le plus d'estime. La repentance dont fit preuve le militaire devant le clerc à cause de son retard à la consécration ne faisait que renforcer l'idée positive que le dernier se faisait du premier.

Il toussa.

Puis ajouta dans un sourire, n'étant pas d'humeur à réprimander :

Ce n'est rien, mon frère.

Il y avait quelque chose de flatteur, voire d'enivrant, dans le fait de voir ainsi un homme traditionnellement enclin à exercer une autorité sur d'autres se soumettre à son tour au jugement moral d'un chétif adolescent tenant à peine debout, surtout quand l'on sait quels étaient l'ambition et l'orgueil dudit adolescent.

C'était là sans doute un grand paradoxe dans l'existence du Lescurien de Poligny : alors même qu'il n'avait jamais été aussi influent et puissant (peut-être en pratique davantage que son Archevêque) à Besançon, et respecté, il se sentait de plus en plus faible, étourdi par le poids des responsabilités, rongé par l'impuissance qu'il constatait à soutenir efficacement la Foi (la faible affluence à cette cérémonie en était la meilleure illustration), et sérieusement diminué par le climat ambiant.

Il ajouta :

Je vais bien, oui... je vous remercie.

Il toussa une nouvelle fois. Son visage semblait celui d'un vieillard impotent. Se pouvait-il que la vigueur et la fougue du clerc enragé et engagé qu'il était à ses débuts et il y a encore quelques semaines eussent cédé la place à la sagesse sénile d'un garçon déjà âgé ? C'était tout comme. Tous le regardaient à présent avec la révérence que l'on réserve usuellement aux vieux sages décatis. Ils semblaient oublier son âge. Pouvait-on leur en vouloir ? Lui-même se voyait grand, sage, docte et puissant. Plus que l'humilité ne l'eût exigé.

Je... me réjouis de bientôt accueillir dans cette chapelle fraîchement bénie les soldats afin de guider leurs âmes.

Le rythme de sa phrase était saccadé. Le sourire pénible que le prêtre affichait ne mettait que plus en lumière ses traits tirés et sa lassitude apparente.

Peccatore se frotta les bras une énième fois.

Il ne fait pas très chaud aujourd'hui...

Il était mal-à-l'aise de ce qu'il venait de faire, ou plutôt au contraire, de ce qu'il n'avait pas fait, assister à la consécration avec le Chrême et l'eau bénite de la nouvelle Chapelle. C'était une pierre angulaire de ses objectifs de mandat, et voila qui la loupait. Ah vraiment, des fois ...

Il n'osait pas relever les yeux, comme si le Frère pouvait demander directement par la penser, à Aristote, de le foudroyer su place. Sa belle-mère lui racontait souvent cette histoire, alors qu'il était encore en Bretagne. Que si nous décevions Aristote, d'un battement de cil, il pouvait abattre son "coulloux" divin, comme sa mère disait. Aussi, il fallait se montrer aimant envers le Très-Haut, et surtout respectueux.

Il avait remarqué que le religieux avait une petite mine, des grosses cernes, même des poches sous les yeux. Les yeux rouges, les joues creusées. Et pourtant, ce n'était pas la période de l'Avent, synonyme de privations en tout genre, et surtout de viande grasse.

- Mon frère, vous êtes sûr que vous allez bien. Oui, il fait très froid en ce moment.

Il ne voulait pas le brusquer, mais l'homme, si fragile, toussait sans cesse, se tenant les bras, et avait donc froid. Acis se tourna vers son soldat de Vesoul.

- Iroutche. D'abord, bonjour à vous. Pourriez-vous aller me chercher une miche de pain et un gobelet de vin chaud de vous prie. c'est pour frère Peccatore, il est en mauvaise forme.

Il défit sa cape bordeaux et la déposa sur les épaules du moine. Cela lui rappelait encore une nouvelle fois une histoire que lui racontait sa mère en Bretagne. Un général romain ayant découpé sa cape pour la donner à un mendiant ...

- Tenez mon frère, cela va déjà vous aider.

Il hésitait à lui réchauffer les épaules. Il était un serviteur d'Aristote avant tout, et il était nécessaire d'adopter une posture respectueuse envers ces prieurs de la société.

Iroutche, toujours au garde à vous, fut surpris par l'attitude de l'officier, très humble. En effet, le Clerc semblait frigorifié et faible. Le soldat répondit :

-J'y vais tout de suite, Capitaine salut

Le Vésulien courut vers la cantine, où il était sûr de trouver tout ce qui était nécessaire à revigorer Frère Peccatore. Il revint le plus vite qu'il put, sans renverser le liquide chaud.

A son retour, il remarqua qu'Acis avait enlevé sa cape pour en recouvrir le Religieux. Honteux, Iroutche se dit qu'il n'avait rien à donner à part son uniforme, qu'il n'allait pas enlever. Le soldat tendit le pain et le vin à l'Aumônier. Il avait également pris un gobelet à l'intention de l'officier, qui semblait avoir froid également. Il dit :

-Voici, Frère Peccatore. Je me suis également permis d'apporter ceci pour vous, Capitaine.

Acis fut heureux de voir que malgré tous les différends qu'il avait pu avoir avec le soldat Vésulien, il ne rechigna pas à partir aussi rapidement que possible vers, il le pensait, la cantine de la caserne. Il revint en un éclair, cela était une bonne chose. Il vit qu'il apporta exactement ce qu'il avait apporté au clerc, puis plus même, un gobelet également pour le Capitaine.

- Merci à vous soldat, il est vrai que cela ne pourra me faire de mal.

Alors qu'il buvait le liquide chaud, il sentit son corps grelotter.

- Aidez-moi soldat, nous allons ramener frère Peccatore dans la chapelle.

Peccatore ne se fit pas prier pour accepter le manteau que lui tendit le Capitaine. Un timide sourire fut la récompense du militaire. Puis ce fut le soldat Iroutche qui vint donner à manger et à boire à l'aumônier. Il y avait quelque chose de flatteur dans cette situation, où la faiblesse de Peccatore le rendait bénéficiaire de la charité et de la bienveillance de deux militaires. Mais également quelque chose d'humiliant, comme si l'adolescent n'était qu'un mendiant, un vagabond nécessiteux.

Il ne fit rien paraître de sa gêne et dit aux deux hommes :

Je vous remercie, mes frères. Vous êtes bien bons.

On avait de plus en plus l'impression que du haut de ses quinze ans d'existence et de ses sept mois de sacerdoce, Peccatore était un grand-père profitant de l'aide de ses petits-enfants. Ses mains violettes étaient crispées sur le gobelet de vin chaud. Il toussa.

Puis Acis parla comme si le clerc était un grand blessé, inapte à se mouvoir de lui-même, et qui nécessitait que des hommes le portassent à l'intérieur... A cette idée, et en dépit de sa fatigue, le Polinois eut un sursaut.

Non non, inutile. Je suis tout à fait capable de rentrer au presbytère seul.

Il était en pleine forme, à l'entendre. Mais même s'il avait été à l'article de la mort, jamais il n'aurait accepté qu'on le traite comme un impotent.
Pour couper court aux discussions sur son état de santé, il se remit en marche, tout en mordant dans le pain que lui apporté Iroutche.

Le trajet ne fut pas long, Peccatore répugnait à donner en spectacle sa faiblesse, aussi n'avait-il pas pris son temps. Arrivés devant le presbytère, il ôta la cape que lui avait tendue Acis et la lui rendit en disant :

Tenez, mon frère, je n'en ai plus besoin. Merci encore.

Iroutche hocha la tête aux propos d'Acis et répondit :

-A vos ordres, Capitaine. salut

Cependant, le Clerc déclina l'offre de l'officier. Le Vésulien se demanda si ils n'avaient pas vexé l'Aumônier en étant trop prévenants...

Les trois hommes marchèrent donc en direction du presbytère, et Frère Peccatore rendit sa cape au Capitaine.

Le soldat, voyant que les deux personnes avaient terminé leur vin, leur demanda :

-Si vous le permettez, je vais aller remettre les gobelets à la cantine.

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